les avantages du lieu, et sur certains agréments de garde-robe qu’il décrit au long à sa belle-sœur avec un enthousiasme, avec une sorte de verve lyrique que je me garderai de citer ; nous sommes devenus trop petite bouche pour cela. Ceux qui, à en juger par une lecture légère, croiraient Chaulieu un petit poëte abbé, musqué et mythologique, se tromperaient fort : c’était une nature brillante et riche, un génie aisé et négligé, tel que Voltaire nous l’a si bien montré dans le Temple du Goût. Le même Voltaire nous le montre, en un autre endroit, un peu glorieux de nature :
Ne me soupçonne point de cette vanité
Qu’a notre ami Chaulieu de parler de lui-même.
Il avait le cœur haut, comme le lui disait La Fare, et, dans le talent,
Le don d’imaginer avec facilité.
C’était là son trait distinctif comme poëte de société et
successeur de Voiture. Ce pétillement d’imagination qui
le prenait au milieu des compagnies et des festins,
l’abandonnait quelquefois, et il avait ses haut et ses bas
comme tous les génies. Il avait assez souvent de l’humeur,
assure-t-on, et se montrait inégalement aimable ; mais
quand il l’était, c’était de plein jet et avec largeur. Avec
cela, il se gouvernait, ai-je dit, et c’est par là qu’il était
un maître et un arbitre écouté dans son monde. Il pensait
comme Hamilton[1] que, « pourvu que la raison
conserve son empire, tout est permis ; que c’est la manière
d’user des plaisirs qui fait la volupté ou la débauche ;
que la volupté est l’art d’user des plaisirs avec délicatesse
et de les goûter avec sentiment. » — « Je suis fait
- ↑ Ou l’auteur, quel qu’il soit, du Dialogue sur la Volupté inséré dans les Œuvres d’Hamilton.