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pairs. Je ne dirai point que Cabanis était le maître de cette école ; Cabanis était trop consciencieux, trop réellement savant pour mériter d’être classé ainsi, et il ne saurait figurer en tête de ce groupe que par son talent d’écrivain et de peintre physiologiste. Le médecin Roussel, qui a écrit sur la Femme, serait plutôt le type de cette classe d’écrivains mixtes. Alibert lui-même, malgré l’appareil spécieux de ses ouvrages, aurait pu s’y rapporter. Richerand, bien que chirurgien (ce qui semble impliquer l’obligation d’être positif), y tenait essentiellement. Ils eurent tous plus ou moins la prétention d’avoir un pinceau dans des sujets qui exigent avant tout exactitude et observation.

Le meilleur moment de débuter pour Pariset eût été ce moment même où débutaient Alibert et Richerand, mais il n’était pas tout à fait prêt encore, et ce ne fut que sous la Restauration qu’il commença à percer. Dès les premiers jours de la Restauration, en mai 1814, M. Roger (celui qui fut de l’Académie française) dit un jour à M. Beugnot, dans le très-court passage de ce dernier au ministère de l’intérieur : « Il y a une place de médecin vacante à Bicêtre ; pour traiter des fous, il vous faut un homme d’esprit : prenez Pariset. » Pariset fut nommé. Son biographe nous le représente, « au milieu de cette triste population d’aliénés, comme un philosophe ou plutôt comme un poëte égaré. » Le spectacle des maladies mentales, lui fournissait surtout un vaste champ de réflexions pour cette étude de l’entendement humain dont il avait puisé le goût et, à ce qu’il croyait, la méthode, dans la société de Cabanis. Les Cours publics qu’il fit sur ces sujets à l’Athénée, et plus tard à la Société des Bonnes-Lettres, n’ont pas été recueillis ; ils ont laissé un vif souvenir chez ceux qui les ont entendus. Il est à croire qu’aux diverses époques, et dans ces lieux