Quel sort peut-on prédire à cet enfant du ciel ?
L’amour, en l’approchant, jure d’être éternel !
Le hasard pense à lui. . . . . . . .
Et tout ce qui suit. Au point de vue poétique, rien de
plus charmant, de mieux trouvé et de mieux enlevé.
Pourtant le poëte a beau faire, il a beau vouloir nous
composer un don Juan unique, contradictoire et vivant,
presque innocent dans ses crimes ; ce candide corrupteur
n’existe pas. Le poëte n’est parvenu qu’à évoquer,
à revêtir un moment par sa magie une abstraction
impossible. Les mots ne se battent pas sur le papier, on
l’a dit. De telles vertus et de tels vices ainsi combinés
et contrastés dans un même être, c’est bon à écrire et
surtout à chanter, mais ce n’est pas vrai humainement
ni naturellement. Et puis, pourquoi nous mettre dans
cette alternative absolue d’avoir à choisir entre les
deux espèces de roués ? Est-ce que la poésie existerait
moins, ô poëte, s’il n’y avait pas de roués du tout ?
Dans le groupe sacré des Champs Élysées de Virgile,
où les plus grands des mortels figurent, il y a place au
premier rang pour les poëtes pieux, c’est-à-dire pleinement
humains, et qui ont rendu avec émotion et
tendresse les larges accents de la nature :
Combien de tels raffinements étaient loin d’approcher de ces hautes et saines pensées !
Voilà bien des réserves, et cependant il y a là de suite, dans Namouna, deux ou trois cents vers tout à fait hors de ligne. Faites l’incrédule, retournez-les en tous sens, mettez-y le scalpel, cherchez chicane à votre plaisir, il peut s’y rencontrer quelques taches, des tons qui crient ; mais, si vous avez le sentiment poétique vrai et si vous êtes sincère, vous reconnaîtrez que le