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Lundi 21 janvier 1850.

DES LECTURES PUBLIQUES DU SOIR,
DE CE QU’ELLES SONT
ET DE CE QU’ELLES POURRAIENT ÊTRE.

On a eu l’idée, dans un moment où il venait des idées de bien des sortes et qui toutes n’étaient pas aussi louables, d’établir dans les divers quartiers de Paris des Lectures du soir publiques, à l’usage des classes laborieuses, de ceux qui, occupés tout le jour, n’ont qu’une heure ou deux dont ils puissent disposer après leur travail. Ces Lectures, dans lesquelles devait entrer le moins de critique possible, le strict nécessaire seulement en fait de commentaires, et où l’on devait surtout éviter de paraître professer, avaient pour objet de répandre le goût des choses de l’esprit, de faire connaître par extraits les chefs-d’œuvre de notre littérature, et d’instruire insensiblement les auditeurs en les amusant. Une lecture bien faite d’un beau morceau d’éloquence ou d’une pièce de théâtre est une sorte de représentation au petit pied, une réduction, à la portée de tous, de l’action oratoire ou de la déclamation dramatique, et qui, tout en les rapprochant du ton habituel, en laisse encore subsister l’effet. C’est un peu ce qu’est le dessin, la lithographie par rapport au tableau. Ces Lectures du soir ont eu déjà de l’effet et un certain succès ; elles sont loin pourtant d’avoir atteint tout le développement dont elles