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Sénat du premier Empire, qui comptait parmi ses membres La Place, La Grange, Sieyès, Volney, Cabanis, Tracy… Ne serait-il donc plus permis d’être de la religion philosophique de ces hommes ? Vous, si éclairé, je vous en fais juge.

« Agréez, monsieur le Président, l’hommage de mes respects, mais je ne puis dire de mes regrets.

« Sainte-Beuve. »


Je ne me crois pas en droit de produire la réponse textuelle de M. le Président du Sénat : qu’il me suffise de dire qu’elle était non-seulement extrêmement polie, mais bienveillante, et que M. le Président Troplong m’assurait que, lorsque ces questions de doctrine se représenteraient par leur côté légal et politique, je serais autorisé à faire entendre ma voix à mon tour et à mon rang de parole.

Près de trois mois se passèrent durant lesquels l’état de ma santé me retint chez moi, et il n’y eut d’ailleurs au Sénat, dans cet intervalle, que des discussions d’un intérêt étranger à la question précédemment soulevée. Mais, dans la séance du vendredi 21 juin, M. le sénateur Suin fit un rapport sur une pétition de cent deux habitants de Saint-Étienne, se plaignant du choix que l’on avait fait de certains ouvrages pour former deux bibliothèques populaires sous le patronage de l’autorité municipale. M. le rapporteur, après quelques considérations générales sur l’instruction des classes laborieuses et sur l’institution des bibliothèques populaires, disait : « Au lieu de vous donner un exposé des faits, nous abrégerons en vous lisant la pétition : elle est courte et rédigée en termes si modérés et si convenables que vous aurez désiré la connaître. » Or, cette pétition, dont il donna lecture, contenait une liste d’auteurs et d’ouvrages fort mélangés, tous également présentés comme répréhensibles. Le rapporteur en proposait le renvoi au ministre de l’instruction publique. La discussion de cette pétition et du Rapport ayant été ajournée et fixée pour la séance du mardi 25 juin, M. Sainte-Beuve eut la parole au début et prononça le discours suivant :