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général, car un tel être n’a point d’existence actuelle, attendu qu’il ne saurait en avoir en aucune façon. Il faut donc que cet être soit l’Etre divin.

C’est un aveuglement singulier de notre intelligence de ne point considérer ce qui s’offre d’abord à ses regards, ce sans quoi il lui est impossible de rien connaître. Mais de même que l’œil fixé sur diverses couleurs ne voit point la lumière qui les lui découvre ou ne la remarque pas s’il la voit, de même l’ail de notre âme, arrêté sur les êtres particuliers et généraux, oublie l’être par excellence, bien qu’il s’offre tout d’abord à ses regards et que le reste ne soit visible que par lui. Cet œil de notre âme se montre donc, en présence de tout ce qu’il y a de plus éclatant dans la nature, réellement semblable à l’œil des oiseaux nocturnes en présence de la lumière. Accoutumé aux ténèbres des êtres créés, aux fantômes des choses sensibles, notre esprit s’imagine ne rien apercevoir alors qu’il s’arrête sur les splendeurs mêmes de l’Erre souverain, ne comprenant pas que cette obscurité si profonde, qui semble alors le frapper, est la plus brillante des illuminations. Ainsi l’œil de notre corps s’arrêtant sur la pure lumière du soleil, croit ne rien voir.

Contemplez donc l’être très-pur et par excellence, si vous le pouvez ; vous comprendrez qu’il est impossible de se le représenter comme recevant l’existence d’un autre, et qu’ainsi il doit nous apparaître nécessairement comme l’être premier sans restriction, gomme rétro qui ne saurait tirer son origine du néant,