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voir briller d’une manière ainsi stable que par une autre lumière dont les rayons, toujours les mêmes, ne peuvent partir d’une créature changeante. C’est donc en cette lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde, en cette lumière qui est la lumière, le Verbe qui était en Dieu au commencement, que nous voyons la vérité.

Notre intelligence perçoit réellement la vérité d’une conclusion quand elle voit cette conclusion suivre nécessairement des prémisses, et cela non-seulement lorsqu’elle découle de termes nécessaires, mais de termes contingents, comme : l’homme court, donc il se meut. Et cette nécessité ne se découvre pas moins dans les êtres privés de vie que dans ceux qui en jouissent : que l’homme vive ou ne vive pas, cette conclusion : Si l’homme court, donc il est en mouvement, est toujours véritable. Ainsi la nécessité d’une conclusion ne vient pas de l’existence matérielle d’une chose, laquelle existence n’est que contingente ; elle ne vient pas de l’existence de la chose en notre âme, car cette existence ne serait qu’une fiction, si cette chose n’existait en réalité. Elle vient donc du modèle éternel où toutes les choses puisent le rapport et l’enchaînement qui les unit selon les règles existantes en ce divin modèle. Toute la lumière de notre raisonnement, dit saint Augustin[1], a sa source dans cette vérité suprême, et c’est à elle que nous devons nous efforcer de parvenir. Nous voyons donc clairement, par tout ce que nous venons de dire,

  1. De ver. rel., c. 39.