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par la création nous entraînent à la recherche de ce bonheur.

Mais le discernement nous conduit d’une manière plus excellente, plus immédiate et plus assurée à la contemplation de l’éternelle vérité. En effet, le discernement faisant abstraction du lieu, du temps et du changement, se rend étranger à toute idée de succession, de mesure, de mutabilité, en vertu d’une raison immuable, infinie et sans fin. Mais rien n’est parfaitement immuable, infini et sans fin que ce qui est éternel, et ce qui est éternel ne l’est qu’en Dieu, ou c’est Dieu même. Si donc tout ce qui s’offre à notre discernement est apprécié par une raison de ce genre, il est clair que Dieu est la raison de toutes choses, qu’il en est la règle infaillible et la lumière véritable en laquelle elles brillent d’une manière assurée, indélébile, indubitable, irréfragable, au-dessus de tout jugement, de tout changement, de toute contrainte, de toute limite, de toute division, et sous un point de vue intellectuel. Il s’ensuit que les lois par lesquelles nous jugeons avec certitude de toutes les choses sensibles qui s’offrent à notre considération, sont pour notre intelligence à l’abri de tout doute et de toute erreur ; qu’elles sont aussi ineffaçables en notre mémoire que si elles y étaient toujours présentes ; qu’elles sont irréfragables et nullement soumises au jugement de notre esprit ; car, dit saint Augustin, nul ne les juge, mais tous jugent nécessairement par elles[1]. Il s’ensuit encore qu’elles sont

  1. De ver. rel., c. 31.