Page:Saint-Victor - Tableau historique et pittoresque de Paris, 1827, T4 P1.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’Europe entière fut étonnée ; et se plaçant alors entre le fleuve et son ennemi, le forçant d’abandonner l’un après l’autre tous les postes qui lui auroient ouvert des communications avec l’autre rive, en même temps qu’il couvroit et mettoit à l’abri de toute hostilité ceux qui assuroient les siennes, le harcelant sans cesse, lui coupant les vivres, lui enlevant ses détachements, il parvint à le chasser de position en position, jusqu’à ce qu’il l’eût réduit à s’aller poster dans un lieu où il ne pouvoit plus lui échapper. Ce fut au moment où il alloit lui livrer bataille, ou plutôt remporter la plus assurée des victoires, et recueillir le fruit de tant et de si nobles travaux, qu’un boulet de canon emporta ce grand homme, et avec lui, sur ce point, la fortune de la France. Aussitôt l’armée françoise repassa le Rhin ; les magistrats de Strasbourg, délivrés de la terreur que leur inspiroit le grand capitaine, livrèrent passage à l’armée impériale ; et Montécuculli, au lieu de la retraite honteuse et désespérée qu’il étoit sur le point d’opérer, entra en Alsace.

Ce fut le prince de Condé qui remplaça Turenne, et c’étoit sans doute le plus digne successeur qu’on pût lui donner. L’armée de Flandres fut confiée au duc de Luxembourg qui eut ordre de se tenir sur la défensive, et l’on crut encore que les grands coups alloient se porter sur le