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Tandis que ces pieux associés continuoient ainsi à amuser et à édifier, tout à la fois, le bon peuple de Paris, une troupe folâtre de jeunes gens des meilleures familles de la ville, unis entre eux par le goût du plaisir et par le penchant à la raillerie, créoient, en concurrence avec eux, un nouveau genre de spectacle, dont la gaieté faisoit les frais, et dans lequel ils offroient à la risée des spectateurs les extravagances humaines, les aventures scandaleuses du jour, et les ridicules de leurs contemporains. Ils se nommèrent eux-mêmes les Enfants sans souci[1] ; leur chef prit le titre de prince des sots, et ils donnèrent à leur drame celui de sottises. À la fois auteurs et acteurs dans ces nouvelles attellanes, ils firent construire aux halles un théâtre, où ils charmèrent la cour et la ville par ces ingénieux badinages. Des lettres patentes de Charles VI confirmèrent la joyeuse institution ; et le prince des sots fut reconnu monarque de l’empire qu’il venoit de fonder.

  1. Clément Marot composa, dit-on, des pièces pour les Enfants sans souci, et partagea leurs amusements. Louis XI les honoroit d’une protection particulière, et assistoit souvent à leurs spectacles. Les guerres civiles qui survinrent ensuite jetèrent de l’amertume et de l’aigreur dans ces jeux d’esprit, et convertirent les acteurs en factieux. Les plus modérés abandonnèrent alors cette société, qui ne fut plus composée que de libertins et de gens perdus de réputation.