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nombre de souverains : ils s’oublièrent jusqu’à représenter sur le théâtre les détails les plus secrets de la vie privée de plusieurs grands personnages ; les crimes et les foiblesses de Jeanne, reine de Naples et de Sicile, n’échappèrent point à leur malignité, et cette hardiesse, jusqu’alors inouïe à l’égard d’une tête couronnée, causa leur perte. Alors défaillirent les Mécènes et défaillirent aussi les poëtes, dit Nostradamus.

Les jongleurs, retombés dans toute la bassesse de leur ancienne condition, furent, depuis ce temps, à peine tolérés dans les villes ; et l’on trouve qu’à Paris ils étoient tous réunis, comme les juifs et les courtisannes, dans une rue, à laquelle ils avoient donné leur nom[1] ; et qu’on y alloit louer ceux dont on pouvoit avoir besoin dans les fêtes ou assemblées de plaisir.

Long-temps auparavant, et lorsque les jongleurs et ménétriers étoient encore florissants, on avoit déjà vu paroître une espèce fort singulière de comédiens, qui devoit un jour les remplacer, et peut-être exciter encore un plus grand enthousiasme. Les croisades occupoient alors tous les esprits : l’imagination ardente des chrétiens de l’Europe se faisoit des objets de vénération de tous ceux qui échappoient à ces

  1. La rue des Ménétriers.