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flatteurs et les adorateurs de ce dieu mortel, il n’en étoit point de plus dangereux pour lui que ces mêmes ministres, qui eurent bientôt reconnu combien il leur seroit facile d’en faire leur dupe. Ombrageux comme il l’étoit sur le pouvoir, et s’étant fait une loi d’en fermer tous les abords et de n’écouter qu’eux, il leur suffit de se prêter à son goût pour les détails du service, qu’il croyoit une des conditions essentielles de l’art de régner, et de l’en accabler au delà de ses forces, pour lui persuader, alors qu’ils lui faisoient faire ce qu’ils vouloient, qu’ils n’étoient que de simples exécuteurs de ses volontés[1]. Il leur fut plus facile encore de lui faire croire

1 Mém. du duc de Saint-Simon, liv. 1.-- « Son esprit, dit-il, naturellement porté au petit, se plut en toutes sortes de détails. Il entra sans cesse dans les derniers sur les troupes, habillement, évolutions, armement, exercice, discipline, en un mot, dans toutes sortes de bas détails ; il ne s’en occupoit pas moins sur ses bâtiments, sa maison civile, ses extraordinaires de bouche : il croyoit toujours apprendre quelque chose à ceux qui en ce genre en savoient le plus, qui recevoient en novices des leçons qu’ils savoient par cœur depuis long-temps. Ces pertes de temps, qui paroissoient au roi avoir tout le mérite d’une application continuelle, étoient le triomphe de ses ministres qui, avec un peu d’art et d’expérience à le tourner, faisoient venir, comme de lui, ce qu’ils vouloient eux-mêmes, et qui conduisoient le grand monarque selon leurs vues et trop souvent selon leurs intérêts, tandis qu’ils s’applaudissoient de le voir se noyer dans les détails. » Il faut sans doute ne se livrer qu’avec quelque méfiance aux récits du duc de Saint-Simon, qui se laisse trop souvent aller à ses pré-*