Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 20.djvu/76

Cette page n’a pas encore été corrigée

Je lui dis ensuite qu’il y avoit dans le sac que M. le duc d’Orléans devoit porter à son travail avec le roi, lors du malheur de cette cruelle apoplexie, chose sur quoi il étoit nécessaire que je l’entretinsse présentement qu’il lui succédoit ; que je n’étois pas en état de supporter le monde ; que je le suppliois de m’envoyer avertir d’aller chez lui sitôt qu’il auroit un moment de libre, et de me faire entrer par la petite porte de son cabinet qui donnoit dans la galerie, pour m’éviter tout ce monde qui rempliroit son appartement. Il me le promit, et dans la journée, le plus gracieusement, et ajouta des excuses sur l’embarras du premier jour de son nouvel état, s’il ne me donnoit pas une heure certaine, et celle que je voudrois. Je connoissois ce cabinet et cette porte, parce que cet appartement avoit été celui de Mme la duchesse de Berry, à son mariage, dans la galerie haute de l’aile neuve, et que le mien étoit tout proche, de plain-pied, vis-à-vis de l’escalier.

J’allai de là chez la duchesse Sforze, qui étoit demeurée toujours fort de mes amies, et fort en commerce avec moi, quoique je ne visse plus Mme la duchesse d’Orléans depuis longtemps, comme il a été marqué ici en son lieu. Je lui dis que, dans le malheur qui venoit d’arriver, je me croyois obligé, par respect et attachement pour feu M. le duc d’Orléans, d’aller mêler ma douleur avec tout ce qui tenoit particulièrement à lui, officiers les plus principaux, même ses bâtards, quoique je ne connusse aucun d’eux ; qu’il me paroîtroit fort indécent d’en excepter Mme la duchesse d’Orléans ; qu’elle savoit la situation où j’étois avec cette princesse, que je n’avois nulle volonté d’en changer ; mais qu’en cette occasion si triste je croyois devoir rendre à la veuve de M. le duc d’Orléans le respect d’aller chez elle : qu’au demeurant, il m’étoit entièrement indifférent de la voir ou non, content d’avoir fait à cet égard ce que je croyois devoir faire ; qu’ainsi, je la suppliois d’aller savoir d’elle si elle vouloit me recevoir ou non, et, au premier cas, d’une façon