Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 19.djvu/442

Cette page n’a pas encore été corrigée

pris beaucoup de goût pour la marquise de Gondrin aux eux de Bourbon, où ils s’étoient rencontrés et fort vus. Elle étoit sœur du duc de Noailles qu’il n’aimoit ni n’estimoit, et veuve avec deux fils du fils aîné de d’Antin, avec qui il avoit toujours eu beaucoup de commerce et de liaisons de convenance et de bienséance, parce qu’ils étoffent tous deux fils de Mme de Montespan. Mme de Gondrin avoit été dame du palais sur la fin de la vie de Mme la Dauphine, jeune, gaie et fort Noailles ; la gorge fort belle, un visage agréable, et n’avoit point fait parler d’elle. L’affaire fut conduite au mariage dans le dernier secret. Pour le mieux cacher, le comte de Toulouse prit le moment de la séance du lit de justice de la majorité, dont il s’excluoit, parce que les bâtards ne traversoient plus le parquet, et à cause de cela n’alloient point au parlement, ni le cardinal de Noailles non plus à cause de sa pourpre qui y auroit cédé aux pairs ecclésiastiques. La maréchale de Noailles alla seule avec sa fille à l’archevêché, où le comte de Toulouse se rendit en même temps seul avec d’O, où le cardinal de Noailles leur dit la messe et les maria dans sa chapelle, au sortir de laquelle chacun s’en retourna comme il étoit venu. Rien n’en transpira, et on fut longtemps sans en rien soupçonner, d’autant que le comte de Toulouse avoit toujours paru fort éloigné de se marier.

En ce même temps la peste qui avoit si longtemps désolé la Provence y fut tout à fait éteinte, et tellement que les barrières furent levées, le commerce rétabli, et les actions de grâces publiquement célébrées dans toutes les églises du royaume, et au bout de peu de mois le commerce entièrement rouvert avec tous les pays étrangers.

Mlle de Beaujolois fut remise à la frontière par le duc de Duras, qui commandoit la Guyenne et qui en eut la commission, au duc d’Ossone, qui avoit celle du roi d’Espagne pour la recevoir, et qui commandoit le détachement de la maison du roi d’Espagne envoyé au-devant d’elle. La duchesse de Duras la remit à la comtesse de Lemos, sa camarera-