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pour y parvenir, à qui il ne falloit pas fournir le plus petit prétexte. Grimaldo, haussant les épaules, convint que j’avois raison, et me dit qu’il avoit heureusement à dépêcher tout présentement un courrier au roi d’Espagne, par lequel il l’avertiroit de mon voyage, de sa cause, de mes raisons personnelles, et n’oublieroit rien pour le disposer à me recevoir sans chagrin. Je remerciai beaucoup Grimaldo et revins chez moi disposer mon voyage, envoyer sur-le-champ des relais et des mules de selle, à quoi Sartine, qui connoissoit le chemin, m’aida fort.

Je partis donc le lendemain avant six heures du matin, et je fus bien étonné de trouver la porte de Madrid fermée, le côté de la clef en dehors, et celui qui la gardoit à cent pas hors cette porte, en sorte qu’il fallut faire escalader la muraille, heureusement assez basse, par un laquais, qui eut encore grand’peine à se faire ouvrir par le portier, qui vint enfin nous faire sortir de la ville. Le comte de Lorges, mon second fils, l’abbé de Saint-Simon, son frère, et le major de son régiment vinrent avec moi. Cette corvée ne tenta point le comte de Céreste.




CHAPITRE XI.


Voyage à Balsaïm. — Fraîche réception tôt réchauffée. — Audience à Balsaïm. — Je couche à Ségovie. — Ségovie. — Cordelier de M. de Chalois. — Je dîne à Balsaïm, et suis Leurs Majestés Catholiques à la Granja. — Comment la Granja devenue Saint-Ildephonse. — Saint-Ildephonse. — Superbe et riche chartreuse. — Manufactures de Ségovie fort tombées. — Je réponds aux lettres du cardinal Dubois et de Belle-Ile. — Bruit ridicule que fait courir mon voyage de Balsaïm. — Hardiesse étrange de Leurs Majestés Catholiques allant et venant de Balsaïm. — Autres lettres curieuses du cardinal