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rien sentir des ouvertures que leur confiance en moi les avoit engagés à me faire sur les deux origines, qu’ils avoient appréhendées, du gonflement de ces glandes, qui devoient demeurer à moi tout seul.

Deux jours après néanmoins, ayant l’honneur d’être en tiers avec eux au sortir de chez la princesse, je m’aperçus que leur inquiétude subsistoit plus qu’ils ne vouloient me la montrer. Raisonnant avec moi sur cette maladie et sur ces glandes qui ne diminuoient point encore, et sur les remèdes qu’on y faisoit, ils me dirent qu’ils avoient commandé à Hyghens d’en écrire un détail fort circonstancié à Chirac, premier médecin de M. le duc d’Orléans, et de le consulter, comme ayant plus de connoissance du tempérament de la princesse, sur quoi ils souhaitoient beaucoup que Chirac, mettant à part les compliments et les lieux communs trop ordinaires entre médecins, mandât son avis de bonne foi et sans détour à Hyghens. Cela m’engagea à en écrire en conformité au cardinal Dubois, en rendant compte à M. le duc d’Orléans et à lui de l’inquiétude, des soins et des attentions infinies de Leurs Majestés Catholiques pour la princesse, sans toutefois leur en toucher le véritable motif, sinon à M. le duc d’Orléans, de ma main, et à lui seul. C’étoit l’affaire de Hyghens avec Chirac, s’il trouvoit à propos de toucher cette corde.

Tant que la princesse fut malade, je ne pus omettre d’y aller tous les jours, et chez Leurs Majestés ensuite, sans que jamais elle me dit un seul mot, quoique ses dames et le princes des Asturies que j’y trouvois souvent, fissent tout ce qu’ils pouvoient pour m’en attirer quelque parole. Quand les glandes commencèrent à se dissiper et l’érésipèle à diminuer, je me contentai d’attendre Leurs Majestés au retour de leur chasse, et de leur dire un mot en passant.

La couverture de mon second fils se fit le 1er février, jour pour jour, précisément quatre-vingt-sept ans depuis la réception de mon père au parlement, comme duc et pair de