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le plus à fortifier mes batteries en Espagne, tant auprès du ministre et du confesseur qu’auprès de Leurs Majestés Catholiques et de toute leur cour, pour me rendre assez agréable au roi et à la reine pour leur inspirer le penchant de me faire ces grâces ; et à leur cour, sinon le désir, du moins une véritable approbation qui pût revenir à leurs oreilles, et fortifier ce penchant que je tâchois muettement de leur faire naître, d’autant qu’il étoit difficile qu’on ne pensât à la cour, et par conséquent qu’il ne s’y parlât, d’une grandesse pour moi dans une occasion si faite exprès, pour ainsi dire, et à toutes les bontés et toutes les distinctions que l’emploi dont j’étois honoré auprès de Leurs Majestés Catholiques attiroit sur moi de leur part.

Peu de jours avant d’aller à Lerma, je reçus des lettres du cardinal Dubois sur mon affaire. Rien de plus vif ni de plus empressé, jusqu’à me donner des conseils pour parvenir à mon but, et à me presser de l’aviser de tout ce en quoi il y pourroit contribuer, et m’assurant que les lettres de M. le duc d’Orléans et les siennes arriveroient à temps. À travers le parfum de tant de fleurs, l’odeur du faux perçoit par sa nature. J’y avois compté, j’avois fait tout ce que la sagesse et la mesure la plus honnête m’avoit permis pour y suppléer. Je pris pour bon toutes les merveilles que le cardinal m’écrivoit, et je partis pour Lerma bien résolu de cultiver de plus en plus mon affaire sans me reposer sur les lettres qu’on me promettoit, mais dans le dessein d’en tirer tout le parti que je pourrois.

En arrivant à mon quartier, près de Lerma, je tombai malade, comme on l’a vu ailleurs, et la petite vérole m’y retint quarante jours en exil. Le roi et la reine, non contents de m’avoir envoyé M. Hyghens, comme je l’ai dit ailleurs, pour ne me point quitter jour et nuit, voulurent être informés deux fois par jour de mes nouvelles, et quand je fus mieux, me firent témoigner sans cesse mille bontés, en quoi toute la cour les imita. Je rends d’autant plus librement hommage