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les compliments du roi et du régent sur cette réconciliation, sans qu’on pensât à l’inconvénient de montrer à l’église française de Londres un seigneur catholique, né et élevé leur frère, qui les avoit depuis persécutés, et qui en avoit su tirer parti du feu roi. On sut incontinent en Angleterre la démonstration de joie qui venoit d’être résolue en France. Georges, outré du retentissement que les éclats de son domestique avoient faits par toute l’Europe, ne s’accommoda pas de les voir prolonger par le bruit que feroit cet envoi solennel. Il fit donc prier le régent de ne lui en envoyer aucun. Comme on ne l’avoit imaginé que pour lui plaire, le voyage du duc de La Force fut presque aussitôt rompu que déclaré. Il en fut pour un commencement assez considérable de dépense, et pour faire revenir beaucoup d’équipages qu’il avoit déjà fait partir, et l’abbé Dubois en recueillit auprès du roi d’Angleterre le double fruit de cet éclat de joie, et de l’avoir arrêté également pour lui plaire.

Masseï, qui avoit apporté la barrette au cardinal de Bissy un peu avant la mort du roi, arriva à Paris. Il étoit fils du trompette de la ville de Florence, et avoit été petit garçon parmi les bas domestiques du pape, alors simple prélat. Son esprit et sa sagesse percèrent ; il s’éleva peu à peu dans la maison, et de degré en degré devint le secrétaire confident de son maître, et enfin son maître de chambre quand il fut cardinal. Sa douceur et sa modestie le firent aimer dans la cour romaine où son emploi le fit connoître. Il le perdit à l’exaltation de son maître ; il étoit de trop bas aloi pour être maître de chambre du pape, mais il en conserva toute la faveur et la confiance ; le pape lui parloit presque de tout, le consultoit et se trouva bien de ses avis. Il le fit archevêque in partibus, pour le mettre à portée d’une grande nonciature. Il l’avoit envoyé dans ce dessein porter la barrette au cardinal de Bissy, dans l’apogée de la faveur de cet ambitieux brouillon, et s’en étoit servi pour s’assurer de l’agrément de la France pour le recevoir nonce, quand le Bentivoglio, qui l’étoit,