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du public, et me promit qu’il le feroit ainsi. Je lui dis que je partois le lendemain ; que Law et l’abbé Dubois, acharnés à la roue, la lui arracheroient ; il me promit de nouveau de tenir ferme à la commutation de peine, m’en dit là-dessus autant que je lui en aurois pu dire ; en m’étendant là-dessus je lui déclarai que je n’étois ni parent ni en la moindre connoissance avec la maison de Horn, ni en liaison avec aucun de ceux qui se remuoient pour elle ; que c’étoit uniquement raison et attachement à sa personne et à son intérêt qui me faisoit insister, et que je le conjurois de demeurer ferme dans la résolution qu’il me témoignoit, puisqu’il en sentoit tout le bon et toutes les tristes suites du contraire, et de ne se point laisser entraîner aux raisonnements faux et intéressés de Law et de l’abbé Dubois, qui se relayeroient pour arracher de lui ce qu’ils vouloient. Il me le promit de nouveau, et comme je le connoissois bien, je vis que c’étoit de bonne foi. Je pris congé et partis le lendemain.

Ce que j’avois prévu ne manqua pas. Dubois et Law l’assiégèrent, et le retournèrent si bien que la première nouvelle que j’appris à la Ferté fut que le comte de Horn et son scélérat de Mille avoient été roués en Grève, vifs, et avoient expiré sur la roue le mardi saint, 26 mars, sur les quatre heures après midi, sur le même échafaud, après avoir été appliqués à la question. Le succès en fut tel aussi que je l’avois représenté à M. le duc d’Orléans. La maison de Horn et toute la grande noblesse des Pays-Bas, même d’Allemagne, furent outrées, et ne se continrent ni de paroles ni par écrit. Il y eut même par mieux d’étranges partis de vengeance, pourpensés, et, longtemps depuis la mort de M. le duc d’Orléans, j’ai trouvé de ces messieurs-là, qui n’ont pu se tenir de m’en parler ni se contenir de répandre le venin qu’ils en conservoient dans le cœur.

Le même jour, mardi 26 mars, que le comte de Horn fut exécuté à Paris, plusieurs Bretons le furent à Nantes par arrêt