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j’expliquai ce que je venois d’apprendre. Je lui dis ensuite que quiconque lui demanderoit la vie du comte de Horn, après un crime si détestable en tous ses points, ne se soucieroit que de la maison de Horn, et ne seroit pas son serviteur ; que je croyois aussi que ne seroit pas son serviteur quiconque s’acharneroit à l’exécution de la roue, à quoi le comte de Horn ne pouvoit manquer d’être condamné ; que je croyois qu’il y avoit un mezzo-termine àprendre, lui qui les aimoit tant, qui rempliroit toute justice et toute raisonnable attente, du public ; qui éviteroit le honteux et si dommageable rejaillissement de l’infamie sur une maison si illustre et grandement alliée, et qui lui dévoueroit cette maison et tous ceux à qui elle tenoit, qui au fond sentoient bien que la grâce de la vie étoit impraticable, au lieu du désespoir et de la rage où tous entreroient contre lui, et qui se perpétueroit et s’aigriroit même à chaque occasion perdue d’entrer dans les chapitres où la sœur du comte de Horn étoit sur le point d’être reçue. Je lui représentai que ce moyen étoit bien simple. C’étoit de laisser rendre et prononcer l’arrêt de mort sur la roue, de tenir toute prête la commutation de peine toute signée et scellée pour n’avoir que la date à y mettre à l’instant de l’arrêt, et sur-le-champ l’envoyer à qui il appartient, puis le jour même faire couper la tête au comte de Horn. Par là toute justice est accomplie, et l’arrêt de roue prononcé, le public est satisfoit, puisque le comte de Horn est en effet puni de mort, auquel public, l’arrêt rendu, il n’importe plus du supplice, pourvu qu’il soit à mort, et la maison de Horn et tout ce qui y tient, trop raisonnables pour avoir espéré une grâce de la vie qu’eux-mêmes en la place du régent n’auroient pas accordée, lui seroient à jamais redevables d’avoir sauvé leur honneur et les moyens de l’établissement des filles et des cadets. M. le duc d’Orléans trouva que j’avois raison, la goûta, sentit son intérêt de ne pas jeter dans le désespoir contre lui tant de gens si considérables en accomplissant toutefois toute justice et l’attente