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de conversation générale, M. le duc d’Orléans me tira à part dans un coin ; il me dit qu’il avoit bien à m’entretenir de choses instantes et pressées, et que ce seroit pour le lendemain. Je le pressai de m’en dire la matière ; il eut quelque peine à s’expliquer, puis me dit qu’il étoit excédé du parlement, qu’il falloit reprendre le projet du remboursement et voir enfin aux moyens de l’exécuter. Je lui témoignai toute ma surprise de le voir revenir encore une fois à un expédient si ruineux, et de l’abandon duquel il étoit demeuré si pleinement convaincu. Le régent insista, mais coupa court, et me donna son heure pour le lendemain ; je lui dis que j’étois tout prêt, mais que je n’avois rien de nouveau à lui exposer sur cette matière, et que je serois surpris si on lui en proposoit quelque solution praticable. La nuit suivante, la fièvre me prit assez forte ; je m’envoyai donc excuser d’aller au Palais-Royal. Le jour d’après, M. le duc d’Orléans envoya savoir de mes nouvelles, et quand je pourrois le voir. Ce fut une fièvre double-tierce, qui impatienta d’autant plus les promoteurs du projet qu’apparemment ils trouvèrent le régent arrêté à n’y avancer pas sans moi, car deux jours après, le duc de La Force vint forcer ma porte de la part de M. le duc d’Orléans. Il me trouva au lit, dans l’accès, et hors d’état de raisonner sur la mission qui l’amenoit, et qu’il me dit être le projet du remboursement du parlement. Il me demanda avec empressement quand il en pourroit conférer avec moi, parce que l’affaire pressoit. Je sus après que c’étoit la première fois que M. le duc d’Orléans lui en avoit parlé. Je répondis au duc de La Force que je ne prévoyois pas être sitôt en état de raisonner, ni d’aller au Palais-Royal, mais que si l’affaire pressoit tant, que j’avois tellement dit à M. le duc d’Orléans, il y avoit plus d’un an, tout ce que je pouvois lui en dire, que je n’avois plus rien à y ajouter ; que tout ce que je pouvois faire, c’étoit de lui prêter à lire un mémoire que j’avois fait là-dessus et que par hasard j’avois gardé. En effet, je le lui