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sa femme de la petite vérole quelques mois après le mariage de son fils. Il en avoit deux fils : celui-ci plein d’esprit et d’ambition, et fort galant de plus, et un aîné qui étoit et fut toujours un balourd [1]. Le père ne fut pas longtemps à les mettre dans les emplois de leur état, et, malgré leur jeunesse, à les faire conseillers d’État, tous deux à peu de distance l’un de l’autre.

Chauvelin, conseiller d’État, mourut aussi. Il avoit été intendant de Picardie, avec peu de lumières, mais beaucoup de probité. Il étoit père de l’avocat général, dont il a été parlé ici, et de Chauvelin, dont la prodigieuse élévation et la lourde chute [2] ont fait depuis tant de bruit.

Le duc de Schomberg mourut subitement en une de ses maisons, près de Londres, à soixante-dix-neuf ans. Il étoit fils du dernier maréchal de Schomberg, qui avoit commandé les armées de Portugal, et depuis celles de France avec réputation. Il étoit Allemand et gentilhomme, mais point du tout parent des deux précédents maréchaux de Schomberg, père et fils, lequel fut duc et pair d’Halluyn, en épousant l’héritière, par de nouvelles lettres.

Ce dernier maréchal de Schomberg dont on parle ici étoit huguenot, et se retira en Allemagne avec sa famille, à la révocation de l’édit de Nantes. L’électeur de Brandebourg le

  1. Les deux fils du garde des sceaux d’Argenson et de Marguerite Le Fèvre de Caumartin, furent René-Louis Le Voyer de Paulmy, marquis d’Argenson, et Marc-Pierre Le Voyer de Paulmy, comte d’Argenson. L’aîné, que Saint-Simon traite sévèrement, a laissé des Mémoires, dont on n’a publié que des fragments (voy. Mémoires du marquis d’Argenson, édit. 1825). Nous avons publié quelques passages des Mémoires inédits. Du reste, Saint-Simon n’a fait que reproduire l’opinion de ses contemporains, qu’exprime en ces termes un des biographes du marquis d’Argenson : « Plus froid, plus mesuré [que son frère], ne se livrant qu’à des amis intimes ; raisonnant juste, mais sans la même grâce dans la façon de s’exprimer, les habitants de Versailles, à une époque où il était d’usage de donner à tout le monde des sobriquets ridicules, le désignèrent sous celui d’Argenson la Bête.  » On prépare en ce moment même une édition plus complète des Mémoires du marquis d’Argenson.
  2. Voy., sur ce Chauvelin, t. XII, p. 474.