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apporta la nouvelle. Quinze jours après, M. de Soubise apporta celle du château, et qu’on avoit brûlé, dans, un petit port près de Bilbao, nommé Santona, trois gros vaisseaux espagnols, qui étoient sur le chantier prêts à être lancés à la mer.

L’archevêque de Narbonne mourut dans son diocèse. Il s’appeloit Le Goust : il étoit frère de La Berchère qui avoit passé sa vie maître des requêtes, dont le fils, guère plus esprité mais fort riche, étoit devenu conseiller d’État et chancelier de M. le duc de Berry, parce qu’il avoit épousé une fille du chancelier Voysin. Le prélat avoit été évêque de Lavaur, puis archevêque d’Aix, après de Toulouse, enfin de Narbonne. C’étoit un grand vilain homme, sec et noir avec des yeux bigles [1], qui avoit été ami intime du P. de La Chaise. L’âme en étoit aussi belle que le corps en étoit désagréable ; très bon évêque et pieux, sans fantaisie et sans faire peine à personne, adoré partout où il avoit été, beaucoup d’esprit et facile, et l’esprit d’affaires et sage, possédant au dernier point toutes celles du clergé, et venant à bout des plus difficiles sans faire peine à personne, allant au bien, parlant franchement aux ministres et en étant cru et considéré. Ce fut une perte qui ne fut pas réparée par M. de Beauvau qui lui succéda, après avoir été évêque de Bayonne, ensuite de Tournay, puis archevêque de Toulouse.

Dupin, célèbre docteur de Sorbonne par sa vaste et profonde érudition, et par le grand nombre et la qualité de ses ouvrages, mourut en même temps. Il fut un étrange exemple de la conduite, si funestement répétée en France par la suggestion des jésuites et de leurs adhérents. Dans les temps de brouillerie avec Rome, sur les propositions de l’assemblée du clergé de 1682, etc., la cour se servit très avantageusement de sa plume, et, pour plaire à Rome depuis, le laissa manger aux poux. Il fut réduit à imprimer

  1. Louches.