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une couronne : contre le droit de la nation en cas d’extinction de tous les mâles de la race régnante, contre le respect et le droit des princes du sang, enfin contre la précieuse vénération due à la loi salique qui distingue si grandement la couronne de France de toutes les autres couronnes. Je le fis souvenir de ce que je lui avois proposé à cet égard vers la fin de la vie du roi, pour l’exécuter dès qu’il ne seroit plus, et de la nécessité que je lui en avois prouvée et de laquelle il n’étoit pas disconvenu de mettre un tel frein à l’ambition de pouvoir être rendu capable de succéder à la couronne, que la vue certaine de la profondeur du précipice retînt bâtards, sujets trop puissants, premiers ministres, favoris démesurés, princes étrangers trop établis et appuyés, d’attenter à ce crime qui en prépare tant d’autres, et d’abuser ou de la folle tendresse, ou de la foible complaisance, ou de l’âge, ou de l’imbécillité d’un roi, ou de l’entêtement extravagant de sa toute-puissance même, pour renverser l’État ; que le silence sous lequel il l’avoit laissé couler, avoit donné le temps au duc du Maine de commettre le second, de le tromper par ce ramas de prétendue noblesse, dont plusieurs étoient, et de son aveu à lui et des principaux de sa maison, en apparence, quoi qu’on eût pu lui dire et follement, contre les ducs, en effet contre lui-même, comme il y avoit bientôt paru par leur belle requête au parlement, et de là par l’appel des bâtards du régent, comme incompétent et impuissant, aux états généraux ou au roi devenu majeur, autre crime d’État et toujours connu et puni comme, tel de contester la puissance royale et d’en faire aucune distinction du roi mineur ou majeur, et par là, M. du Maine l’avoit réduit en la presse où il s’étoit trouvé entre les princes du sang et les bâtards, et après une longue et criante injustice, ou déni de justice, en faveur des bâtards, forcé par leur audace à ventiler (1) son pouvoir de régent, de les déclarer déchus et non habiles à

1. Discuter.