Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 16.djvu/314

Cette page n’a pas encore été corrigée

chez moi, où il étoit venu. Bientôt après M. de La Force y arriva aux nouvelles, dont il fut fort satisfoit.

Le lendemain dimanche 21, sortant de mon lit à sept heures et demie, on m’annonça un valet de chambre de M. le Duc, qui avoit une lettre de lui à me rendre en main propre, qui étoit déjà venu plus matin, et qui étoit allé ouïr la messe aux Jacobins en attendant mon réveil. Je n’étois lors ni n’avois jamais été en aucun commerce direct ni indirect avec lui. J’en avois eu très peu lors, de son affaire contre les bâtards, mais comme nous n’en avions pu tirer aucun parti pour la nôtre, j’avois perdu de vue tous ces princes jusqu’à la messéance. Je passai dans mon cabinet avec ce valet de chambre, et j’y lus la lettre que M. le Duc m’écrivoit de sa main, que voici :

« Je crois, monsieur, qu’il est absolument nécessaire que j’aie une conversation avec vous sur l’affaire que vous savez ; je crois aussi que le plus tôt sera le mieux. Ainsi je voudrois bien, si cela se peut, que ce fût demain dimanche, dans la matinée ; voyez à quelle heure vous voulez venir chez moi ou que j’aille chez vous ; choisissez celui que vous croirez qui marquera le moins, parce qu’il est inutile de donner à penser au public. J’attendrai demain matin votre réponse, et vous prie en attendant de compter sur mon amitié en me continuant la vôtre.

« Signé : H. de Bourbon. »

Je rêvai quelques moments après l’avoir lue, et je me déterminai à voir M. le Duc, que je ne pouvois éconduire, après quelques questions au valet de chambre sur l’heure et le monde de son lever, à en tenter le hasard plutôt que celui de le faire remarquer à ma porte par le président Portail, qui en logeoit vis-à-vis, et qui pouvoit être chez lui un dimanche matin. Je ne voulus point écrire, et je me contentai de charger le valet de chambre de lui dire que je serois chez lui à l’issue de son lever. Je n’étois pas achevé d’habiller que Fagon vint savoir des nouvelles de la veille. Il en fut ravi, et encore plus du message de M. le Duc par l’espérance que