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point qu’il n’eût en sa réponse. Elle fut que Son Altesse Royale étoit fort lasse des tracasseries du parlement ; il pouvoit employer un autre terme plus juste ; qu’il avoit ordonné à toutes les troupes de la maison du roi qui sont à Paris et autour, de se tenir prêtes à marcher, et qu’il falloit que le roi fût obéi. L’ordre en effet en fut donné, et de se pourvoir de poudre et de balles. Le lendemain dimanche, le premier président, accompagné de tous les présidents à mortier et de plusieurs conseillers, fut au Palais-Royal. Il étoit l’homme de M. et de Mme du Maine, et le moteur des troubles ; mais il y vouloit aussi pêcher, se tenir bien avec le régent, pour en tirer et se rendre nécessaire, conserver en même temps crédit sur sa compagnie pour la faire agir à son gré. Son discours commença donc par force louanges et flatteries pour préparer à trois belles demandes qu’il fit : première, que l’édit des monnaies fût envoyé au parlement pour l’examiner, y faire les changements qu’il croiroit y devoir apporter et après l’enregistrer ; seconde, que le roi eût égard à leurs remontrances dans une affaire de cette conséquence, et que le parlement croit fort préjudiciable à l’État ; troisième, qu’on suspendit à la monnaie le travail qu’on y faisoit pour la conversion des espèces. Le régent répondit à la première, que l’édit avoit été enregistré à la cour des monnaies, qui est cour supérieure, conséquemment suffisante pour cet enregistrement ; qu’il n’y avoit qu’un seul exemple de règlement pour les monnaies porté au parlement ; qu’il n’y avoit envoyé celui-ci que par pure (il pouvoit ajouter très sotte et dangereuse) complaisance pour ses faux et traîtres confidents, valets du parlement, tels que les maréchaux de Villeroy, d’Huxelles, et de Besons, Canillac, Effiat et Noailles : à la seconde, que l’affaire avoit été bien examinée et les inconvénients pesés ; qu’il étoit du bien du service du roi que l’édit eût son entier effet : à la troisième, qu’on continueroit à travailler à la conversion des espèces à la monnaie, et qu’il falloit que le roi fût obéi.