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de régence. — Absences singulières. — Cinq mille livres de menus plaisirs par mois, faisant en tout dix mille livres, rendues au roi. — Manèges du parlement pour brouiller, imités en Bretagne. — Saint-Nectaire, maréchal de camp, fait seul lieutenant général longtemps après avoir quitté le service. — Son caractère. — Mme d’Orléans fait profession à Chelles fort simplement. — Arrêt étrange du parlement en tous ses chefs. — Le parlement de Paris a la Bretagne en cadence. — Le syndic des états est exilé. — Audacieuse visite de la duchesse du Maine au régent. — Fureur et menées du duc et de la duchesse du Maine et du maréchal de Villeroy. — Commission étrange sur les finances donnée aux gens du roi par le parlement. — Bruits de lit de justice ; sur quoi fondés. — Mémoires de la dernière régence fort à la mode, tournent les têtes. — Misère et léthargie du régent. — L’abbé Dubois, Argenson, Law et M. le Duc, de concert, chacun pour leur intérêt, ouvrent les yeux au régent et le tirent de sa léthargie. — M. le duc d’Orléans me force à lui parler sur le parlement. — Duc de La Force presse contre le parlement par Law, espère par là d’entrer au conseil de régence. — Mesures du parlement pour faire prendre et pendre Law secrètement, en trois heures de temps. — Le régent envoie le duc de La Force et Fagon conférer avec moi et Law. — Frayeur extrême et raisonnable de Law. — Je lui conseille de se retirer au Palais-Royal, et pourquoi. — Il s’y retire le jour même. — Je propose un lit de justice aux Tuileries, et pourquoi là. — Plan pris dans cette conférence. — Abbé Dubois vacillant et tout changé.


Il y avoit déjà du temps qu’on se plaignoit dans les fermes générales de beaucoup de faux sauniers ; les précautions y furent peu utiles ; on vit de ces gens-là paroître en troupes et armés. Ce désordre ne fit que s’augmenter. Il y eut un vrai combat dans la forêt de Chantilly entre eux, des archers et des Suisses postés des garnisons voisines sur leur marche qu’on avoit éventée, et les faux sauniers furent battus, leur sel pris et leurs prisonniers branchés, mais beaucoup de Suisses et d’archers tués. Les exécutions ne firent qu’en accroître le nombre, les aguerrir, les discipliner ; en sorte que, ne faisant d’ailleurs de mal à personne, ils étoient favorisés et avertis partout. La chose alla si loin que des personnes principales furent plus que soupçonnées de les soutenir et de les encourager, pour s’en faire des troupes dans