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les avoit administrées avec son père et son beau-père, puis seul après eux jusqu’à la mort du roi : ensuite il en avoit conservé le fil par le secret de la poste dont il étoit demeuré directeur, puis devenu surintendant. Quelque part qu’il plût au régent de m’y donner dans son cabinet depuis que le conseil de régence n’étoit plus devenu qu’une forme à qui tout étoit dérobé en ce genre jusqu’à conclusion résolue, ma mémoire n’auroit pu m’en fournir la suite et les dates parmi tant de faits croisés, avec l’exactitude et la précision nécessaire si je n’avois eu d’autre secours. Torcy s’étoit fait à mesure un extrait de toutes les lettres qu’il continua jusqu’à la fin d’août 1718, et c’est un dommage irréparable, et que je lui ai bien reproché depuis, de ne l’avoir pas continué tant qu’il a eu les postes, que nous verrons que le cardinal Dubois lui arracha en 1721. On y verroit jusque-là dans ces trois années bien des choses curieuses qui demeureront ensevelies, et tout le manège et l’intrigue de la chute d’Albéroni et du double mariage d’Espagne. Torcy m’a prêté ses extraits ; c’est d’où j’ai puisé le détail du récit que j’ai donné depuis la mort du roi, de la suite et du détail des affaires étrangères. Je les ai abrégées et n’ai rapporté que le nécessaire. Mais ce qui s’est passé en 1718 m’a paru si curieux et si important que j’ai cru devoir non pas abréger ni extraire, mais m’astreindre à copier fidèlement tout et n’en pas omettre un mot ; j’ai seulement laissé tout ce qui regarde la constitution, comme j’avois fait dans les extraits que j’ai abrégés sur les années précédentes, parce que je me suis fait une règle ainsi que je l’ai dit plusieurs fois, de ne point traiter cette matière ; mais j’ai conservé la copie exacte et entière de tous les extraits des lettres que M. de Torcy m’a prêtés et qu’il a faits, dans lesquels on pourra justifier tout ce que je rapporte des affaires étrangères, et voir, de plus, ce qui regarde la suite de l’affaire de la constitution, de laquelle je n’ai rien dit, et où on verra des horreurs à faire dresser les cheveux à la tète de la part du nonce Bentivoglio,