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régent la garantie de la Sicile ; instances inutiles. Son Altesse Royale lui répondoit que la France n’avoit point d’armée navale. Le mariage d’une des princesses ses filles avec le prince de Piémont étoit alors une de ses vues, et c’étoit vraisemblablement un moyen d’y réussir que de dégager le duc de Savoie de la guerre de Sicile en persuadant au roi d’Espagne de consentir aux propositions de Stanhope. Deux motifs pouvoient y porter Sa Majesté Catholique. L’un étoit la difficulté de réduire les places de Sicile ; l’autre motif, la conclusion d’une trêve entre l’empereur et les Turcs, dont la nouvelle étoit récemment arrivée.

Ces apparences de pacification et d’assurer là tranquillité générale de l’Europe, n’empêchoient pas le régent de chercher encore d’autres moyens d’en assurer le repos, et soit pour en être plus sûr, soit que le génie dominant du siècle fût de négocier, Son Altesse Royale vouloit que les monarques du nord, particulièrement le czar, crussent que la conclusion du traité proposé au roi d’Espagne ne l’empêcheroit pas de s’unir avec ces princes ; même, s’il étoit nécessaire, qu’elle renouvelleroit de concert avec eux la guerre contre l’empereur ; mais, soit vérité, soit dessein d’amuser, les ministres de ces princes, principalement celui du czar, ajoutèrent peu de foi à de tels discours. Ce dernier assura Cellamare que le czar ne pouvant approuver les liaisons nouvelles de la France avec l’Angleterre et la maison d’Autriche, vouloit de concert avec le roi de Suède, unir leurs intérêts communs à ceux du roi d’Espagne. On attribuoit à de mauvais conseils (Dubois) la confiance que le régent avoit prise aux promesses du roi d’Angleterre, et Cellamare, persuadé de l’utilité dont une ligue des princes du nord pouvoit être à son maître, pressoit le ministre du czar de le représenter à Son Altesse Royale, et de l’engager, s’il étoit possible, à fomenter lés troubles qu’on croyoit prêts à s’élever en Écosse.

Le duc d’Ormond, nouvellement arrivé à Paris, où il se