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qui en dépendent, et de faire assembler les états du royaume pour autoriser cette renonciation. Ces ministres Anglois s’objectoient eux-mêmes qu’un tel acte fait par un prince mineur seroit nul ; que s’il paraissoit qu’on eût, quelque doute sur la solidité du traité d’Utrecht, l’incertitude sur la foi qui faisoit la base de tout l’édifice affaibliroit toutes les précautions nouvelles qu’on prendroit pour les soutenir ; qu’il étoit enfin plus à propos de s’abandonner à la disposition de ce traité, et de croire que la clause insérée en faveur de la maison de Savoie, valoit une renonciation du roi et du régent que de troubler la France en lui demandant une assemblée d’états, dangereuse et principalement odieuse dans un temps de minorité. Ainsi rien ne les embarrassoit, pas même les murmures de la nation, qui voyoit avec peine les apprêts d’une guerre prochaine avec l’Espagne. Les négociants, uniquement touchés de l’intérêt du commerce, ne dissimuloient pas à quel point leur déplaisoit une rupture sans prétexte, sans avantage pour les Îles Britanniques, uniquement utile aux intérêts de l’empereur, et par conséquent aux vues d’agrandissement et d’affermissement qu’un roi d’Angleterre, duc de Hanovre, pouvoit avoir en Allemagne. De telles vues paraissoient très dangereuses, bien loin d’être conformes à l’intérêt et à la liberté de la nation ; mais étant assujettie, et n’ayant d’autre pouvoir que de former des voeux, elle souhaitoit et elle espéroit qu’une guerre si mal entreprise produiroit la ruine du ministère, consolation et ressource ordinaire des Anglois.

Les ministres d’Angleterre parurent alors aussi contents du mouvement que Châteauneuf se donnoit en Hollande pour engager la république à souscrire à l’alliance, qu’ils avoient paru précédemment mal satisfaits de la mollesse et de la partialité dont ils avoient accusé plusieurs fois cet ambassadeur dans les plaintes qu’ils en avoient portées au régent. Ils commencèrent à louer son zèle, sa vigilance,