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L’appartement de Mme la Dauphine étoit préparé pour lui, et il coucha dans la communication de Mgr le Dauphin, père du roi, qui fait à cette heure des cabinets pour la reine.

Mardi 25, il avoit parcouru les jardins, et s’étoit embarqué sur le canal dès le grand matin, avant l’heure qu’il avoit donnée à d’Antin pour se rendre chez lui. Il vit tout Versailles, Trianon et la Ménagerie. Sa principale suite fut logée au château. Ils menèrent avec eux des demoiselles qu’ils firent coucher dans l’appartement qu’avoit Mme de Maintenon tout proche de celui où le czar couchoit. Bloin, gouverneur de Versailles, fut extrêmement scandalisé de voir profaner ainsi ce temple de la pruderie, dont la déesse et lui qui étoient vieux l’auroient été moins autrefois. Ce n’étoit pas la manière du czar ni de ses gens de se contraindre.

Mercredi 26, le czar, qui s’amusa fort tout le jour à Marly et à la machine, manda au maréchal de Tessé à Paris qu’il y arriveroit le lendemain matin à huit heures à l’hôtel de Lesdiguières, où il comptoit le trouver, et qu’il le mèneroit en lieu de voir la procession de la Fête-Dieu. Le maréchal lui fit voir celle de Notre-Dame.

Le défrai de ce prince coûtoit six cents écus par jour, quoiqu’il eût beaucoup fait diminuer sa table dès les premiers jours. Il eut un moment envie de faire venir à Paris la czarine qu’il aimoit beaucoup ; mais il changea bientôt d’avis. Il la fit aller à Aix-la-Chapelle ou à Spa, à son choix, pour y prendre des eaux en l’attendant.

Dimanche 30 mai, il partit avec Bellegarde, fils et survivancier de d’Antin pour les bâtiments, et beaucoup de relais pour aller dîner chez d’Antin à Petit-Bourg, qui l’y reçut et le mena l’après-dînée voir Fontainebleau où il coucha, et le lendemain à une chasse du cerf de laquelle le comte de Toulouse lui fit les honneurs. Le lieu lui plut médiocrement, et point du tout la chasse où il pensa tomber de cheval ; il trouva cet exercice trop violent, qu’il ne connoissoit