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quoi qu’on ait essayé depuis cette régence. Le roi y mène qui bon lui semble, ceux qu’il y mène y sont sans voix s’ils ne sont pas officiers de la couronne, ou en effet de son conseil d’État ; ainsi rien de plus distinct des états, ni qui y ait moins d’influence et de rapport.

Que ce débat s’émeuve, très assurément Votre Altesse Royale n’en peut douter. Elle voit les mouvements de plusieurs de la noblesse sur des prétextes où je suis trop intéressé pour en vouloir parler. Mon tendre amour pour mon ordre, je n’en crains point le terme, mon respect pour lui me fera regarder sa division avec larmes, et me feroit déplorer en secret, mais sans en venir jusqu’aux plaintes, s’il venoit à être séduit jusqu’au point de renoncer, en faveur du désordre et de la confusion, à la seule récompense solide qu’il puisse prétendre, et à ce qui a toujours existé dans la monarchie, et à ce qui n’est pas moins en usage de tous les temps, dans tous les autres États que le nôtre, de quelque genre de gouvernement qu’ils soient chacun en leur manière, au lieu de s’unir tous ensemble comme frères au pied du trône, comme en 1649 par un si différent exemple, contre les excressences qui n’ont et ne prétendent que contre notre ordre, et comme n’étant d’aucun des trois ou hors de l’ordre naturel et commun des trois qui composent et forment la nation. Mais ce mouvement même si peu de la convenance d’un arrêt du conseil, s’il m’est permis que ce mot m’échappe, doit faire sentir à Votre Altesse Royale que le second ordre, poussé à bout de toutes les manières avant que vous soyez arrivé à la régence, a dessein et une grande volonté de travailler à son rétablissement ; et que, d’accord en certaines matières, que quelques-uns d’eux ont avidement saisies, avec quelques notables du tiers état qui les leur ont artificieusement présentées, dans l’appréhension d’une union utile à l’État et à Votre Altesse Royale, mais propre aux vues particulières de ces notables, cette union ne peut durer parmi des intérêts si essentiels et si fort contradictoires qui