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la couronne insistent à être jugés par l’autorité seule de celui qui la porte.

C’est à Votre Altesse Royale à peser les grandes suites d’un tel procès déféré par un régent à des états généraux. Est-ce que le roi mineur n’a pas le même pouvoir que le roi majeur ? Mais en Angleterre où les rois ont un pouvoir si limité en comparaison des nôtres, on a vu des échafauds dressés sur cette question, et des tètes coupées pour avoir contesté cette maxime d’égalité de pouvoir à tout âge, qui y a passé jusqu’en ce jour en loi, et qui, en France, n’a jamais été disputée. Cette déférence aux états ne peut donc rouler que sur leur supériorité de puissance à celle des rois en ces matières, et alors, Monseigneur, où en êtes-vous et que faites-vous ? Que si c’est seulement une consultation plus étendue que vous désirez, pensez-vous qu’un jugement de cette importance échappe aux états, comme je vous l’ai représenté à la fin de la première partie de ce mémoire, et que cette consultation à tout le moins ne passe pas pour un point de droit en ces matières, qui y met dès lors l’autorité des états au-dessus de celle du roi même. Or, si elle y est reconnue supérieure en quelque point que ce soit, où la bornerez-vous dans le reste, et quel frein lui pourrez-vous donner durant la tenue des états, à l’âge du roi et dans la situation personnelle où vous êtes ? Quelles partialités ne feront point les princes mécontents dans les états ? Quelles autres la constitution n’y excitera-t-elle pas ? Mais ces matières appartiennent à la considération des états prise en particulier. C’est à Votre Altesse Royale à faire à ce dixième article toute l’attention qu’il mérite, et à moi à passer au détail de la considération des trois ordres qui composent les états généraux.

Le premier des trois est maintenant dans une agitation si grande à l’occasion de la constitution Unigenitus, qu’il est bien à craindre que ce mouvement d’ébullition ne s’étende aux matières temporelles dont il sera traité dans l’assemblée