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sur le traité de [la] France avec l’Angleterre, qui étoit lors sur le point d’être signé. Hohendorff voulut douter que le pape consentît à la retraite du Prétendant d’Avignon, qui par sa demeure en cette ville romproit le traité, dont ce malheureux prince seroit mal conseillé de faciliter la conclusion. Il ajouta qu’il ne pouvoit croire que la France, pour l’en faire sortir, usât de violence contre le pape. Le nonce répandit, à ce qu’on prétend, qu’il étoit facile à la France de faire partir le Prétendant sans user de violence, en le menaçant de ne lui plus payer de pensions. Hohendorff auroit dû alors offrir que l’empereur y suppléât ; mais il se contenta de conclure que ce prince étoit perdu s’il passoit en Italie. Le nonce en demeura persuadé. Il écrivit au pape que l’Église étoit intéressée à rompre une ligue que les ennemis du saint-siège et de la religion regardoient comme le plus solide fondement de leurs espérances. Ce n’étoit pas la première fois qu’il avoit prêté auprès du pape les plus malignes intentions au régent sur l’alliance qu’il vouloit faire avec les hérétiques, et sur la douceur qu’il témoignoit aux huguenots dans le royaume. Ils se revirent une seconde fois. Hohendorff dit au nonce qu’il alloit dépêcher un courrier à l’empereur, pour lui conseiller de contre-miner, par d’autres ligues, celle que la France venoit enfin de signer, que la plus naturelle seroit avec le pape pour la sûreté réciproque de leurs États, laquelle étant promptement déclarée, feroit penser la France à deux fois à ne pas donner à l’empereur un sujet de rupture, en attaquant Avignon ; qu’il y avoit du temps pour négocier, puisque les ouvrages du canal de Mardick ne devoient être détruits que dans le mais de mai ; enfin il s’avança d’assurer, sans consulter la volonté ni les finances de son maître, qu’il fourniroit de l’argent au Prétendant s’il étoit nécessaire, et pressa le nonce d’engager le pape de faire parler de cette affaire à l’empereur duquel elle seroit bien reçue.

Le nonce, craignant les reprochés de Rome de s’être trop