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néanmoins qu’il en rendroit compte au roi son maître, et qu’il prioit Stanhope d’en écrire à l’agent d’Angleterre à Madrid. Toutefois il ne laissa pas de recevoir assez d’impression de cette confidence pour se resserrer beaucoup avec d’Iberville, que le régent tenoit à Londres, avec ordre de lui communiquer tous ses ordres, et de le consulter sur tout, quoique d’ailleurs ils fussent amis, et de se prendre de plus en plus aux cajoleries de Stanhope, qui l’assuroit ainsi que les ministres allemands du roi d’Angleterre, que quoi qu’en publiassent les bruits publics, ils ne vouloient point de guerre avec la France, mais conserver un bon pied de troupes et de vaisseaux ; en même temps ils ne laissoient point de travailler à unir le roi de Sicile à l’empereur par un traité.

Après avoir été longtemps, eux et Trivié, ambassadeur de Sicile à Londres, à qui parleroit le premier, Stanhope s’étendit sur le préjudice que la Sicile causoit à la maison de Savoie, et montra ainsi à dessein que le premier article qui seroit demandé par l’empereur seroit la cession de cette île. Trivié, qui n’avoit point douté de ce projet, cria bien haut, mais en ministre d’un prince foible, qui pourtant ne veut pas se laisser dépouiller ; il en prit occasion de s’éclaircir de la situation de l’Angleterre avec l’empereur, sur quoi Stanhope répondit qu’elle en étoit fort recherchée, mais qu’il n’y avoit rien de conclu entre eux. Les menaces anglaises de rompre avec la France, en traitant avec l’empereur, aboutirent pourtant à suspendre une levée ordonnée de seize régiments, et l’armement de douze vaisseaux de guerre, et à écrire dans toutes les cours pour leur demander de refuser tout asile et retraite au Prétendant dans leurs États. Le roi d’Espagne refusa retraite et secours à ce malheureux prince, à qui il en avoit assez libéralement fourni dans l’espérance de succès. Cellamare en parla au régent qui approuva cette dernière résolution de l’Espagne à cet égard, qui n’étoit pas en état de se brouiller, ni de soutenir