Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/276

Cette page n’a pas encore été corrigée

Sainte-Maure et du Mont qui n’étoient pas moins liés là et n’en attendoient pas moins que Roucy toute leur fortune, et de là tomba avec furie sur la Marsaille et Hochstedt, et me reprocha de lui vouloir faire faire un plaisant capitaine des gardes par rapport au roi, à lui, et même au public en ce genre qui connoissoit ce qui s’étoit passé en ces deux combats. La conclusion fut de me défendre de lui en plus parler, et un ordre de dire au comte de Roucy de sa part, qu’il ne changeroit rien là-dessus à la disposition constante du feu roi, qui n’avoit accordé ces charges-là qu’à des ducs ou à des maréchaux de France, dont il suivroit exactement l’exemple, et se garderoit bien d’y manquer. Cela dit et répété fort sec, le régent entama d’autres propos et différentes matières.

Pendant cette dernière partie de la conversation, convaincu qu’il n’y avoit plus à revenir au comte de Roucy, je pensai à mon beau-frère. C’étoit la charge de son père. Je ne pus me résoudre à la demander pour moi, pouvant l’espérer pour lui, quoique j’eusse tout lieu d’en être très mal content, et que jamais il n’eût daigné se mettre à portée de rien. La demander pour lui à la fin de la conversation, et l’obtenir, ce fut la même chose. J’avois affaire à des gens peu faciles pour l’arrangement du payement de quatre cent mille livres, quoique j’eusse obtenu en même temps le même brevet de retenue. Je convins donc avec M. le duc d’Orléans qu’il tiendroit l’agrément secret, jusqu’à ce que toutes nos mesures fussent prises et arrêtées. Jamais il ne m’entra dans l’esprit que le comte de Roucy pût avoir le plus léger soupçon de ma conduite à son égard. La façon dont j’avois vécu avec lui toute ma vie, et dont en toute occasion je l’avois servi, et la franchise et la droiture dont j’étois connu, n’avoient pas permis de laisser entrer en mon esprit aucune pensée de doute.

Je témoignai donc le lendemain au comte de Roucy, qui vint chez moi, combien j’étois fâché de n’avoir pu réussir à