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autre raison que leur bon plaisir et leur licence, contester aux ducs ce qui a été de tout temps, et ce qui n’est pas en la puissance du régent de leur ôter ; que c’étoit être aveugle de ne voir pas la trame de toute cette menée, tissue par le duc du Maine, son plus grand ennemi, et par le premier président, qui ne l’étoit pas moins, et un avec le duc du Maine, qui amusoient des gens sans connoissance, et qui profitoient de leur vanité pour unir un nombreux groupe ensemble, le tenir en leurs mains, disposer de leur aveuglement, et en temps et lieu s’opposer à lui et à son gouvernement, à leur tête, et en unisson avec les provinces et avec le parlement.

Je le priai de se souvenir de l’embarras que l’assemblée de 1649, quoique avouée par Monsieur et par la reine régente, leur avoit donné ; la juste crainte qu’ils en avoient enfin conçue, lorsqu’elle voulut parler d’autre chose que du rang des Bouillon et des Rohan ; enfin les soins et les peines qu’il y eut à les séparer et à les empêcher de se rassembler.

L’amour de la division et l’esprit de défiance qui, avec la plus étrange faiblesse, dominoient le régent, le rendirent sourd à mes remontrances. Il croyoit que l’intérêt des ducs me faisoit parler, et trouver le sien dans ce vacarme ; et dans la suite, la crainte de cette prétendue noblesse le saisit et l’arrêta quand il eut commencé enfin à ouvrir les yeux sur ses démarches. Dans tous ces divers temps, tantôt il convenoit avec moi, et promettoit d’imposer, tantôt il esquivoit. Je le connoissois trop pour être la dupe de ses meilleurs propos. Un long usage m’avoit appris à lire dans ses yeux et dans sa contenance, quand il me parloit vrai ou contre sa pensée. Mais je comptois faire mon devoir de le poursuivre, et j’avouerai aussi que je me dépiquois en le mettant au pied du mur. Il sentit trop tard la solidité de mes représentations.

L’affaire du bonnet et des autres usurpations du parlement ne se suivoit pas avec moins de chaleur. Les ducs s’assembloient