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temps y avoient figuré dans le gouvernement et dehors, enfin des vues incertaines et diverses d’une honnête retraite, dont le lieu étoit combattu dans son esprit. Ces huit heures de conversation avec une personne qui y fournissoit tant de choses curieuses me parurent huit moments. L’heure du souper, même tardive, nous sépara, avec mille protestations vraies et réciproques, et un pareil regret entre elle et Mme de Saint-Simon de ne pouvoir se voir. Elle me promit de m’avertir de son départ à temps de passer encore une journée ensemble.

Son voyage à Versailles se passa peu agréablement. Elle alla le matin du mercredi 27 mars, dîner à Versailles chez la duchesse du Lude qui y demeuroit toujours. Elle y resta jusqu’à une demi-heure près de celle que le roi devoit passer chez Mme de Maintenon, où elle alla l’attendre seule avec elle ; elle n’y demeura guère plus en tiers avec eux, et se retira après à la ville, chez Mme Adam, femme d’un premier commis des affaires étrangères, qui lui donna à souper et à coucher, et où elle fut très peu visitée. Le lendemain elle dîna chez la duchesse de Ventadour, et s’en retourna à Paris. Elle obtint peu après de remettre sa pension du roi, moyennant une augmentation en rentes sur l’hôtel de ville, dont elle eut quarante mille livres de rente. Cela étoit, outre l’augmentation du double, plus solide qu’une pension, qu’elle ne doutoit pas de perdre dès que M. le duc d’Orléans en deviendroit le maître. Elle songeoit à se retirer en Hollande ; mais les États généraux ne voulurent point d’elle à la Haye ni à Amsterdam. Elle avoit compté sur la Haye. Elle pensa alors à Utrecht, mais elle s’en dégoûta bientôt, et tourna ses projets sur l’Italie. Elle ne retourna plus à la cour que pour en prendre congé. M. du Maine, en reconnoissance des grandeurs qu’elle avoit procurées à M. de Vendôme en Espagne, lui valut cette grâce pécuniaire du roi.