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Rhin, où tout de suite elles virent prendre Landau. Ce malheur avoit été précédé de la délivrance du maréchal de Villeroy, que le roi se piqua de remettre en honneur. Il se fit battre à Ramillies, où, sans perte à peine de deux mille hommes, il fut rechassé du fond des Pays-Bas dans le milieu des nôtres, sans que rien le pût arrêter.

Restoit l’espérance de l’Italie, où M. le duc d’Orléans fut enfin relever Vendôme, mandé pour sauver les débris de la Flandre. Mais le neveu du roi fut muni d’un tuteur, sans l’avis duquel il ne pouvoit rien faire, et ce tuteur étoit une linotte qui lui-même auroit eu grand besoin d’en avoir un. Il n’eut jamais devant les yeux que la crainte de La Feuillade et de son beau-père. On a vu dans son lieu à quels excès ces ménagements le portèrent, les malheurs prévus et disputés par le jeune prince, dépité à la fin jusqu’à ne vouloir plus se mêler de rien, et la catastrophe qui suivit de si près.

Ainsi, après de prodigieux succès de toutes les sortes, l’infatigable faveur de Villeroy, celle de Tallard, la constante confiance en Vaudemont, les folles et ignorantes opiniâtretés de La Feuillade, le tremblant respect de Marsin pour lui jusqu’au bout, coûtèrent l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie en trois batailles, qui, toutes les trois ensemble, ne coûtèrent pas elles-mêmes quatre mille morts.

L’engouement pour Vendôme et ses perverses vue s’acheva de tout perdre en Flandre.

En 1706, Tessé, par la le vue du siège de Barcelone dans la même année que les défaites de Ramillies et de Turin, avoit réduit le roi d’Espagne à traverser du Roussillon en Navarre par la France, et à voir l’archiduc proclamé dans Madrid en personne. Le duc de Berwick y rétablit les affaires, M. le duc d’Orléans ensuite. Elles s’y perdirent de nouveau par la perte de la bataille de Saragosse, qui ébranla une autre fois le trône de Philippe V, tandis qu’on nous enlevoit les places en Flandre, et que la frontière s’y réduisoit