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il ne voulut voir que peu de gens distingués et les ministres étrangers à son dîner, qui avoient, et ont encore, le mardi fixé pour aller à Versailles. Il tint conseil de finances ensuite, et travailla après avec Desmarets seul. Il ne put aller chez Mme de Maintenon, qu’il envoya chercher. Mme de Dangeau et Mme de Caylus y furent admises quelque temps après pour aider à la conversation. Il soupa en robe de chambre dans son fauteuil. Il ne sortit plus de son appartement, et ne s’habilla plus. La soirée courte comme les précédentes. Fagon enfin lui proposa une assemblée des principaux médecins de Paris et de la cour.

Ce même jour, Mme de Saint-Simon, que j’avois pressée de revenir, arriva des eaux de Forges. Le roi entrant après souper dans son cabinet l’aperçut. Il fit arrêter sa roulette, lui témoigna beaucoup de bonté sur son voyage et son retour, puis continua à se faire pousser par Bloin dans l’autre cabinet. Ce fut la dernière femme de la cour à qui il ait parlé, parce que je ne compte pas Mmes de Lévi, Dangeau, Caylus et d’O qui étoient les familières du jeu et des musiques chez Mme de Maintenon, et qui vinrent chez lui quand il ne put plus sortir. Mme de Saint-Simon me dit le soir qu’elle n’auroit pas reconnu le roi, si elle l’avoit rencontré ailleurs que chez lui. Elle n’étoit partie de Marly pour Forges que le 6 juillet.

Le mercredi 21 août, quatre médecins virent le roi, et n’eurent garde de rien dire que les louanges de Fagon, qui lui fit prendre de la casse. Il remit au vendredi suivant à voir la gendarmerie de ses fenêtres, tint le conseil d’État après son dîner, travailla ensuite avec le chancelier. Mme de Maintenon vint après, puis les dames familières, et grande musique. Il soupa en robe de chambre dans son fauteuil. Depuis quelques jours on commençoit à s’apercevoir qu’il avoit peine à manger de la viande, et même du pain, dont toute sa vie il avoit très peu mangé, et depuis très longtemps rien que la mie, parce qu’il n’avoit plus de dents.