Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/222

Cette page n’a pas encore été corrigée

encore deux ennemis d’un parfoit concert, qui mettoient dans la nécessité de les contre-balancer, d’autant plus grande qu’il étoit presque également difficile de n’y pas mettre le comte de Toulouse et de pouvoir compter sur lui. On le pouvoit sur d’Aguesseau, mais son naturel étoit foible et timide, et il étoit d’ailleurs tout neuf en tout ce qui n’étoit pas de son métier, et en la plus légère connoissance des choses de la cour et du monde. Nous parlâmes de l’archevêque de Cambrai, et la discussion ne fut pas longue. Toute l’inclination de M. le duc d’Orléans l’y portoit, comme je l’ai déjà remarqué ailleurs ; et comme je l’ai aussi raconté en son temps, j’avois travaillé à entretenir ce goût et cette estime. Nous cherchâmes après à bien des reprises. L’un n’étoit pas sûr, un autre pas assez distingué, celui-ci manquoit de poids, celui-là ne seroit pas approuvé du public, sans compter l’embarras de trouver sûreté, fermeté et capacité dans un même sujet. À chaque discussion cet embarras nous fit quitter prise et remettre à plus de réflexions et d’examen, et pour le dire tout de suite, ces remises, devant et depuis le testament, nous conduisirent jusqu’à la mort du roi, tant sur le choix que sur la mécanique, ce qui me fait remettre d’expliquer l’un et l’autre au temps où M. le duc d’Orléans les décida, ainsi que les membres de tous les conseils.

Il y avoit longtemps que je pensois à une assemblée d’états généraux, et que je repassois dans mon esprit le pour et le contre d’une aussi importante résolution. J’en repassai dans ma mémoire les occasions, les inconvénients, les fruits de leurs diverses tenues ; je les combinai, je les rapprochai des mœurs et de la situation présente. Plus j’y sentis de différence, plus je me déterminai à leur convocation. Plus de partis dans l’État, car celui du duc du Maine n’étoit qu’une cabale odieuse qui n’avoit d’appui que l’ignorance, la faveur présente, et l’artifice dont le méprisable et timide chef, ni les bouillons insensés d’une épouse qui n’avoit