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L’âge d’aucun prince du sang ne leur en permettoit l’entrée, et quand on auroit franchi toute règle en faveur de M. le Duc, le plus âgé de tous, qu’attendre d’un prince, né le 28 août 1692, encore sous l’aile de Mme la Duchesse, et sous la tutelle de d’Antin, qui n’avoit ni instruction ni lumières, et qui ne montroit que de l’opiniâtreté et de la brutalité, sans la moindre étincelle d’esprit ? Un tour de force étoit un début dangereux parmi tant de sortes d’affaires, et qui n’étoit pas dans le caractère de faiblesse de M. le duc d’Orléans.

L’abus énorme de leur grandeur par-dessus toute mesure, et au mépris de toutes les lois divines et humaines, étoit bien un crime, et leur attentat au rang, aux droits, à l’état des princes du sang, et à la succession à la couronne, en étoit bien un de lèse-majesté, et qui en emportoit toute la punition sur le duc du Maine qui seul l’avoit commis, et de notoriété publique, à l’insu du comte de Toulouse, qui depuis ne l’avoit jamais approuvé. Mais quelle corde à remuer dans ces premiers moments de régence, sans l’appui et la juridique réquisition des princes du sang tous enfants ! c’étoit donc une chose à laquelle il ne falloit pas penser pour lors, et qu’il falloit réserver aux temps et aux occasions qu’on feroit naître, selon que le duc du Maine se conduiroit, trop grand pour l’attaquer sans avoir bien pris les plus justes mesures, trop établi pour l’attaquer sans être en certitude et en volonté bien déterminée de le pousser par delà les dernières extrémités, et ses enfants à ne pouvoir se relever, ni avoir jamais aucune existence, châtiment trop juste et mille fois trop mérité de ce Titan de nos jours, et leçon si nécessaire à la faiblesse et à la séduction des rois, et à l’ambition effrénée de leurs bâtards pour toute la suite de la durée de la monarchie. Je ne pus donc conseiller l’exclusion du duc du Maine, dont M. le duc d’Orléans sentit bien toute la difficulté. Lui et le maréchal de Villeroy dans le conseil de régence, c’étoit y mettre deux ennemis certains, et