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et nullement par héritage ni représentation. Conséquemment tout engagement pris par le roi prédécesseur périt avec lui, et n’a aucune force sur le successeur, et nos rois payent le comble du pouvoir qu’ils exercent pendant leur vie par l’impuissance entière qui les suit dans le tombeau. Mineurs, à quelque âge qu’ils se trouvent, pour revenir de ce qu’ils font eux-mêmes contre leurs intérêts, ou du préjudice qu’ils y reçoivent par le fait d’autrui qu’ils auront consenti et autorisé, auront-ils moins de privilèges d’être libres et quittes de ce qui leur nuit, à quoi ils n’ont contribué ni par leur fait, ni par leur engagement, ni par leur autorisation ? et de condition tellement distinguée en mieux que leurs sujets par cette minorité qui les relève de tout ce qui leur préjudicie, à quelque âge qu’ils l’aient fait ou ratifié, peuvent-ils devenir de pire condition que tous leurs sujets, dont aucun n’est tenu que de son propre fait, ou du fait de celui dont il hérite ou qu’il représente, et qui ne le peut être du fait particulier de celui dont le bien lui échoit à titre de substitution ? Ces raisons prouvent donc avec évidence que le successeur à la couronne n’est tenu de rien de tout ce que son prédécesseur l’étoit ; que tous les engagements que le prédécesseur a pris sont éteints avec lui, et que le successeur reçoit, non de lui, mais de la loi primordiale qui l’appelle à la couronne par le fidéicommis et la substitution, qu’elle lui a réservée à son tour pure, nette, franche, libre et quitte de tout engagement précédent.

Un édit bien libellé, bien serré, bien ferme et bien établi sur ces maximes et sur les conséquences qui en résultent si naturellement, et dont l’évidence ne peut être obscurcie non plus que la vérité et la solidité des principes dont elles se tirent, peut exciter des murmures, des plaintes, des cris, mais ne peut recevoir de réponse solide ni d’obscurcissement le plus léger. Il est vrai que bien des gens en souffriroient beaucoup, mais il n’est pas moins vrai, dans la plus