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professe étant chez vous et du P. Tellier y venant, on prenne tout ce que lui et son secrétaire auront de papiers chez eux, et deux hommes sûrs, mais polis, qui paquetteront, au sortir de chez vous, le P. Tellier et son compagnon dans un carrosse, y monteront avec eux, et les conduiront tout de suite à la Flèche, où ils remettront six mille livres au P. Tellier, et le livreront à l’intendant de la province, qu’on aura pourvu d’y faire trouver avec les ordres du roi pour lui et pour les jésuites de la Flèche concernant le P. Tellier. C’est ce qui se doit exécuter à Versailles, pour que l’aller et venir, tant des supérieurs que du P. Tellier, donne le temps nécessaire de saisir les papiers en leur absence, et faire la capture des trois prisonniers en même temps. Je crus pouvoir sans témérité assurer M. le duc d’Orléans d’une joie et des bénédictions publiques de cette conduite, et que, bien loin d’emporter aucun danger, elle accéléreroit la paix. Je l’avertis qu’il se falloit bien garder de rien dire sur tout cela, avant ni après l’exécution, aux cardinaux de part ni d’autre, ni à personne des leurs : à l’un, parce que cela lui feroit prendre trop de force, et, lui, paroîtroit s’enrôler avec lui ; aux autres, parce que cela sentiroit l’excuse et la crainte. Si les uns ou les autres vouloient lui en parler en louange ou en plaintes, leur fermer la bouche poliment ; mais leur dire tout court, d’un ton à se faire sentir, que vous voulez la paix, et que vous êtes résolu de l’avoir sans prendre aucun parti que celui de la paix. S’ils passent outre, la révérence, leur dire que vous êtes fâché de n’avoir pas le loisir d’être plus longtemps avec eux, et vous retirer. Assurez-vous, dis-je à M. le duc d’Orléans, qu’avec cette conduite, l’étourdissement de la mort du roi, et les affaires ecclésiastiques, surtout la feuille des bénéfices entre les mains du cardinal de Noailles, fera tomber les armes des mains à Rohan et Bissy, qui, étant ce qu’ils sont, n’ont plus de fortune personnelle à faire, qui hasarderoient leur crédit pour leur famille et leur considération en se raidissant, et