Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/169

Cette page n’a pas encore été corrigée

de Meilleraye, et fut mère du duc Mazarin ; l’autre, religieuse et fondatrice du couvent de la Croix au faubourg Saint-Antoine à Paris.

Comment d’Effiat devint premier écuyer de Monsieur, cela est trop ancien pour moi, et en soi peu important. Comment, après avoir empoisonné Madame, et le roi l’ayant su, comme on a vu d’original, et étant outré de cette mort, il a laissé d’Effiat en charge, qui lui a valu l’ordre à la présentation de Monsieur, en 1688, c’est encore ce que je ne puis expliquer. Mais on a vu aussi que le chevalier de Lorraine et lui s’étoient bien mis avec le roi, Mme de Maintenon et les bâtards, en leur vendant Monsieur, et M. le duc de Chartres pour son mariage ; qu’Effiat s’entretint toujours depuis bien avec Mme la duchesse d’Orléans, et sourdement avec M. du Maine ; que de moitié, inséparable avec le chevalier de Lorraine, il gouverna Monsieur jusqu’à sa mort, très souvent avec insolence, et se mêloit avec autorité de ses affaires, de sa cour, de sa famille ; et que cela avoit accoutumé M. le duc d’Orléans à une estime de son esprit et de sa capacité, qui passoit souvent la considération et la déférence, et que d’Effiat sut bien maintenir et s’y aider de Dubois, et lui réciproquement. Il étoit veuf, sans enfants, depuis longues années, d’une Leuville que Monsieur fit gouvernante de ses enfants, quand il chassa la maréchale de Clérembault ; et à Mme d’Effiat succéda la maréchale de Grancey, mère de Mme de Maré, qui la fut sous et après elle. Effiat vivoit garçon, fort riche, fort peu accessible, aimant fort la chasse, et disposant de la meute de Monsieur, et après lui [de celle] de M. le duc d’Orléans, qui ne s’en servoient point ; six ou sept mois de l’année à Montargis, ou dans ses terres presque seul, et ne voyant que des gens obscurs, fort particulier, et obscur aussi à Paris, avec des créatures de même espèce ; débuchant parfois en bonne compagnie courtement, car il n’étoit bien qu’avec ses grisettes et ses complaisants. C’étoit un assez petit homme,