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prendre le nom de Sforza qu’il prit en effet, et le fit passer à sa postérité. De Bosio, son puîné, est venu le duc Sforce qui donne lieu à cette remarque, dont le frère aîné fut duc de Milan, par son mariage avec l’héritière fille du duc Philippe-Marie Visconti. Son fils Galeas-Marie, successivement gendre du marquis de Mantoue et du duc de Savoie, fut tué jeune et laissa le duché de Milan à son fils Jean-Galeas tout enfant sous la tutelle de son frère Ludovic, si connu par le surnom de More, qui le maria à la fille d’Alphonse, duc de Calabre, depuis roi de Naples, l’empoisonna après et usurpa le duché de Milan sur son petit-neveu François qui ne fut point marié ; et tous deux moururent en France : celui-ci, abbé de Marmoutier ; Louis le More à Loches, dans une cage où il vécut plusieurs années, et où Louis XII l’avoit fait enfermer, après l’avoir fait prisonnier. Son fils aîné rentra ensuite dans le duché de Milan, et en fut encore dépouillé, et vint achever sa vie à Paris sans alliance. Son frère François fut plus heureux. Il fut rétabli à Milan, et mourut sans enfants de la fille de ce Christiern, roi de Danemark, fameux par ses insignes cruautés et sa catastrophe, et d’une sœur de Charles-Quint. Il y a eu d’autres branches tant légitimes que bâtardes de ces Sforce qui ont eu en Italie des établissements et des alliances considérables. Je n’ai pu refuser ce petit écart de curiosité avant d’en venir à la duchesse Sforce.

Elle étoit belle, sage et spirituelle, et plut assez au roi à son retour pour donner lieu à Mme de Maintenon de l’écarter. C’étoit encore assez qu’elle fût nièce de Mme de Montespan, et qu’elle en eût ce langage singulier dont j’ai parlé plus d’une fois. Il se forma dans les suites une liaison de convenance entre elle et Mme la duchesse d’Orléans, qui parvint au dernier point d’intimité et de confiance, jusqu’à ne pouvoir se passer l’une de l’autre, qui a duré tant que la duchesse Sforce a vécu, dont Mme de Castries, leur cousine germaine, fille de M. de Vivonne et dame d’atours de Mme la duchesse d’Orléans, qui avoit bien plus d’esprit,