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Géran et de Nogaret les furent trouver aussitôt et leur apprirent que leur fils étoit marié, et marié avec cinq cent mille livres, à la vérité un peu légères, et peu présentes, à la fille d’un duc et pair bien élevée, et qui sortoit tout à l’heure d’un couvent, et avec la survivance de Vincennes. Jamais surprise ne fut pareille à la leur. À la surprise succéda la joie. Ils ne pouvoient comprendre que la chose fût vraie Le mariage se fit aussitôt après. On a vu que la considération seule de Mme du Châtelet avoit valu à son mari, et sans qu’elle s’en mêlât ni lui non plus, le gouvernement de Vincennes à la mort de son neveu. Ainsi la vertu fut doublement récompensée uniquement par des traits de Providence, et il est bien remarquable que de toutes les dames du palais, ce fut la seule qui en tira parti, et toujours sans s’en donner aucun soin, et même sans le savoir.

La paix avec l’empereur et l’empire fut publiée, le Te Deum chanté, des feux de joie le soir. Le roi qui étoit à Marly où le Te Deum ne put être chanté à sa messe, l’alla entendre sur les cinq heures du soir à la paroisse. Le duc de Tresmes donna une grande collation à l’hôtel de ville, et à minuit un grand repas chez lui à beaucoup de dames et d’étrangers, et à des gens de la cour.

En même temps [le roi] donna à Contade une grand’croix de l’ordre de Saint-Louis surnuméraire, n’y en ayant point de vacante, en attendant un gouvernement.

Ce Marly-ci fut encore bien funeste. Il est à propos de le reprendre des le commencement, car c’est le même où arriva le marquis de Brancas, et où le cardinal del Giudice vit le roi, et pendant lequel se sont passées les choses qui ont été racontées depuis.

Quelque temps auparavant, Mme de Saint-Simon s’en étoit allée de Versailles à Paris incommodée ; elle y eut la rougeole. Sur la fin de cette rougeole, le roi alla à Marly le mercredi 11 avril ; peu de jours après, Mme de Lauzun et moi reçûmes chacun un billet de Bloin, qui nous mandoit