Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/459

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


NOTES.


I. MORCEAU INÉDIT DE SAINT-SIMON RELATIF À L'ACADÉMIE FRANÇAISE.


Pages 56 et suiv.


La plupart des notes de Saint-Simon sur le Journal de Dangeau se retrouvent dans ses Mémoires. En voici une qui fait exception. En parlant des faveurs dont Villars fut comblé à son retour, en 1714 (Voy. p. 51 et suiv. de ce volume), Saint-Simon ne dit rien de son élection à l’Académie française (17 mai 1714). Mais dans ses notes sur le Journal de Dangeau qui mentionne cette nouvelle, on trouve le passage suivant[1] :

« L’Académie françoise se perdit peu à peu par sa vanité et par sa complaisance. Elle seroit demeurée en lustre si elle s’en étoit tenue à son institution ; la complaisance commença à la gâter : des personnes puissantes par leur élévation ou par leur crédit protégèrent des sujets qui ne pouvoient lui être utiles, conséquemment ne pouvoient lui faire honneur. Ces protections s’étendirent après jusque sur leurs domestiques par orgueil, et ces domestiques qui n’avoient souvent pas d’autre mérite littéraire furent admis. De là cela se tourna en espèce de droit que l’usage autorisa, et qui remplit étrangement l’Académie. Pour essayer de se relever au moins par la qualité de ses membres, elle élut des gens considérables, mais qui ne l’étoient que par leur naissance ou leurs emplois, sans lesquels les lettres ne les auroient jamais admis dans une société littéraire, et ces personnes eurent la petitesse de s’imaginer que la qualité d’académiciens les rendoit académiques. De l’un à l’autre cette mode s’introduisit, et l’Académie s’en applaudit par la vanité de faire subir à ces hommes distingués

  1. Je dois ce morceau inédit de Saint-Simon à l’obligeance de M. Amédée Lefèvre-Pontalis, auteur d’un excellent Discours sur la Vie et les Mémoires de Saint-Simon, qui a été couronné par l’Académie française.