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royaume. Ce furent ses dernières paroles. En les achevant elle se leva brusquement, sans toutefois qu’il lui fût échappé quoi que ce soit contre ces deux ducs ni contre les ducs en général. On se quitta avec beaucoup de compliments forcés d’une part, et de respects de l’autre qui ne l’étoient pas moins, le duc de La Force ayant toujours l’œil sur le duc d’Aumont, qui n’osa rien dire en particulier à la duchesse du Maine, ni la suivre. Ils partirent aussitôt de Sceaux et vinrent rendre compte de leur voyage.

Ce qui vient d’être raconté de la conversation de Sceaux est copié mot à mot sur le rapport qui en fut fait par le duc de La Force, en présence du duc d’Aumont, qui n’y trouva rien à ajouter, à diminuer ni à changer. Il parut si important et en même temps si curieux qu’il fut écrit sur-le-champ même, et c’est d’ou il a été pris. On n’en a omis que ce que ce premier écrit omit, qui est un fatras de répliques et de dupliques de part et d’autre, qui n’étoient que des répétitions continuelles en d’autres termes des premiers, et pour ainsi dire des propos matrices, qui furent écrits, et qu’on a exactement copiés. On en usera ici comme on a fait sur les impostures du premier président au roi, c’est-à-dire qu’on supprimera tout commentaire. Le simple narré est non seulement au-dessus de tous ceux qu’on pourroit faire, mais il se peut dire que la proposition de la duchesse du Maine, et la menace de sa part de culbuter l’État, et sa déclaration de le faire plutôt que perdre la succession à la couronne, surpassent non seulement toute attente, mais toute imagination. Resteroit à savoir le véritable projet de cet engagement de conférence avec la duchesse du Maine. Était-ce un panneau tendu au désir du bonnet, à l’embarras honteux de l’état actuel de cette affaire, et à la sottise espérée des ducs que cet écrit d’assurance pour les en accabler après par le roi, par les princes du sang, par le parlement, par le public ? et il semble que le personnage infâme de délateur et d’imposteur