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à leur suite, et me conjurer d’y porter M. le duc d’Orléans. Je répondis froidement que je serois méchant avocat d’une cause que je tenois aussi mauvaise, et que ce prince de plus s’étoit fort moqué avec moi d’une idée si ridicule à leur égard, et si visiblement nuisible aux pairs. Pressé à l’excès par un homme fort abondant, et que je vis déterminé à ne point sortir de ma chambre, je lui dis que tout ce que ma déférence lui pouvoit accorder étoit de contribuer à une assemblée où cette matière des princes du sang fût de nouveau mise en délibération, mais nombreuse et non autrement, où chacun exposeroit ses raisons et où la pluralité décideroit ; et qu’au cas qu’il y passât de faire ce que l’on pourroit pour persuader les princes du sang de suivre les présidents, je verrois là-dessus M. le duc d’Orléans, non pour lui dire des raisons où je n’en trouvois aucune, mais pour lui exposer respectueusement les désirs qu’on avoit cru devoir former. De guerre lasse ou autrement, M. d’Aumont se contenta de ce qu’il remportoit ; mais en s’en allant, il me pria de l’attendre chez moi le lendemain matin à pareille heure pour raisonner du fruit de nos communes réflexions. Cette seconde conversation fut plus courte ; nous demeurâmes tous deux dans nos mêmes sentiments.

On se lassoit cependant des délais du premier président, ils n’étoient plus fondés sur sa compagnie, puisqu’il avoit tenu plusieurs assemblées chez lui là-dessus ; ni sur sa santé, puisqu’il étoit tous les matins à la grand’chambre, et les après-dînées dans les rues. Il étoit même bien peu respectueux pour le roi de différer si longtemps, et sans prétexte, de lui rendre compte d’une affaire qu’il lui avoit recommandée, et à laquelle il lui avoit dit qu’il ne trouvoit point de difficulté. À la fin, d’Antin en paria au roi, sur ce qu’il vit que ces lenteurs ne tendoient qu’à soulever le parlement, comme on le va voir, et commettre les ducs avec ses membres. Il se garda bien pourtant d’alléguer cette raison au roi ; il y en avoit assez d’autres à dire. On avoit sagement